Designers @ Work : quelles perspectives pour les métiers du design numérique ?

Virginie Coux (Thiga), Amélie Boucher (D-Edge, groupe Accor), David Chriqui (Mozza.io), Lucie Bordelais (Figma), Mathias Frachon (The Product Crew) et Benoît Drouillat (*designers interactifs*) ont dressé un état des lieux des métiers du design numérique et présenté des pistes d’évolution.

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Les métiers du design numérique ont bénéficié d’une année 2022 à la fois très favorable et empreinte d’incertitudes. Dans la tech, particulièrement, les salaires ont été artificiellement portés par l’importance des levées de fonds, un rythme de recrutement rapide et les exigences élevées des candidats, confortés par le dynamisme du marché. Il y a 5 ans, un designer confirmé pouvait espérer se positionner dans une fourchette de 36 à 44 K€ bruts annuels alors qu’en 2022, cette fourchette atteignait plutôt 45–54 K€.À partir du 3e trimestre, les entreprises ont adopté une approche plus prudente, certaines optant pour un gel des recrutements. La part d’entreprises ayant gelé les recrutements est passée de 11 à 20 % entre le début et la fin de l’année. Ce coup d’arrêt illustre le retournement de cycle des entreprises de la tech, qui représentent une part significative des débouchés de l’emploi des designers.

Par ailleurs, la diversité (genre, âge, parcours, origines culturelles, handicap) est resté un enjeu encore très largement sous-évalué dans la profession. Les managers, qui ont pris une place de premier plan sur le marché et ont vu leurs équipes s’agrandir, n’en ont pas encore pris pleinement la mesure.

Les niveaux de salaires et la tension sur les profils de designers seniors sont les symptômes de l’emballement du marché, qui s’apparente à une bulle. L’étude Figures, publiée dans Les Échos, révèle que les métiers du design et du produit sont les mieux rémunérés juste après ceux de la finance, devant les ingénieurs, les data analysts, les juristes et les commerciaux. Cette situation contraste fortement avec les conditions de rémunération d’il y a 5 ans.

Dans les métiers du design, les rémunérations progressent pour tous les niveaux d’expérience mais avec de fortes disparités chez les seniors. Une minorité bénéficie de niveaux de rémunération au-delà de 80 K€ qui constitue un seuil symbolique, d’après l’enquête de The Product Crew et de *designers interactifs*. Les écarts femme/homme de 4,5% (d’après l’étude Figures).

L’Apec affichait un certain optimisme fin 2022 concernant les intentions de recrutement des cadres : « malgré le climat d’incertitude, davantage d’entreprises prévoient de recruter des cadres au 4e trimestre 2022 (…) Les intentions de recrutement de cadres au 4e trimestre rebondissent [dans les grandes entreprises]. »

Mais, dans les entreprises Tech, on constate un fléchissement. En effet, 61 % des design managers indiquent qu’ils vont continuer à recruter en 2023 (enquête The Product Crew / *designers interactifs*), contre 71 % en début d’année. Beaucoup ont massivement recruté en 2022 et déclarent avoir les effectifs suffisants. Ces entreprises seront probablement moins attractives et moins généreuses, en raison de l’impératif de rentabilité fixé par les investisseurs, de la moindre fréquence des levées de fonds. Cette situation risque de donner un coup d’arrêt à la progression des salaires, même si on anticipe des difficultés de recrutement toujours importantes sur les profils seniors. Ce sera “la fin de l’abondance”.

Pour aller plus loin :

Enquête sur l’emploi et les salaires du design numérique